Caserne Boudet, prison de l’oubli
188, rue de Pessac
Parce que dès septembre 1940 les rafles allemandes engorgeant la prison du Fort du Hâ, l’occupant réquisitionne la prison militaire de la caserne Boudet. Y sont incarcérés : résistants, gaullistes, communistes et tous ceux qui s’opposent aux nazis.
A l’origine, le bâtiment abritait la gare de Bordeaux-Ségur. La première gare ferroviaire de Bordeaux, ouverte en 1841.
Plus tard, le ministère de la Guerre rachète les bâtiments et y installe un tribunal, une prison militaire et une caserne connue sous le nom de « Caserne Boudet », du nom du général Jean Boudet natif de Bordeaux qui s’était illustré dans les guerres Napoléoniennes.
Pendant la guerre, l’occupant allemand va utiliser à l’abri des regards la torture pour faire parler les prisonniers:
Un casernier, M. Maucourant (1), établit après-guerre un rapport de ce qu’il y a vu :
Par tous les temps, les détenus qui ne voulaient pas parler étaient immergés, tout vêtus, dans le lavoir de la cour de la prison et on leur plongeait la tête sous l’eau pour les forcer à parler(…) À plusieurs reprises, ayant eu à m’introduire dans la chapelle de la prison, j’y ai remarqué la présence de madriers fixés au mur et supportant des crochets de pedottes, de menottes spéciales, de sangles et d’autres instruments. (…) J’ai alors appris qu’ils étaient utilisés pour torturer les Français détenus.
Après la guerre la prison continue de servir. C’est au tour des « colabos » d’y être enfermés. Près de deux mille personnes comparaitront devant le tribunal militaire pour douze exécutions capitales. La prison militaire est finalement fermée le 30 novembre 1947.
Cela n’empêchera pas le conseil militaire de tenir séance. Notamment pour le procès le 12 février 1953 des Français et membres de la Gestapo qui avaient participé avec la division SS Das Reich au massacre d’Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944.
En poussant les portes des cellules d’autres souvenirs remontent à la surface. Ceux dont la plaque ne parle pas.
La caserne Boudet n’a pas été seulement une prison allemande. Quelques semaines avant que les nazis ne prennent possession des lieux, des prisonniers français très particuliers occupaient les cellules. Des condamnés à morts pour trahison, espionnage et sabotage au profit de l’Allemagne.
En juin 1940, en pleine débâcle, les autorités françaises les avaient transférés des prisons parisiennes du Cherche-Midi et de la Santé jusqu’à Bordeaux.
Le 22 juin 1940, quelques heures avant la signature de l’Armistice, quatre d’entre eux sont réveillés à 3h45. Ils sont amenés à sur le champ de tir de Verthamon à Pessac. A l’aube, il sont face au peloton d’exécution. Ils sont fusillés à 5h45. Le plus jeune, Roger Rambaud, avait 17 ans.
(1) Service historique des archives la Défense, département de l’armée de terre, 13J 1421 et 13 J 1497
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