Un vol Biscarosse – New York
Le 14 juillet 1939, le premier vol commercial sans escale avait lieu entre les Etats-Unis et la France en hydravion. Le petit village landais se voyait déjà devenir un des plus grand « hub aérien» d’Europe.
Après avoir volé plus de 28 heures à 205 km/h avec un moteur en rade, l’hydravion « Lieutenant de vaisseau de Paris » se pose finalement sur la surface plane du lac de Biscarosse.
A l’origine du projet, un entrepreneur béarnais, Pierre-Georges Latécoère.
Il a 56 ans et c’est son heure de gloire. Avec ce vol, il vient d’ouvrir une porte sur l’Atlantique et compte bien faire de Biscarosse le point d’entrée en Europe pour les riches voyageurs américains.
Réformé pendant la première guerre mondiale, il investit toute son énergie dans l’effort économique en fournissant depuis Montauban des obus et surtout une arme nouvelle : l’avion. Il en sûr, le XXe siècle sera aérien.
Au sortir de la guerre, il crée une ligne postale aérienne Toulouse-Barcelone, qui se prolonge jusqu’à Rabat puis Dakar.
Les obstacles sont nombreux, de l’Espagne qui refuse le survol de son territoire aux tribus arabes qui prennent les pilotes en otage.
Mais rien n’arrête « l’Aéropostale » et ses légendes : Mermoz, Saint-Exupéry, Guillaumet…
En 1930, l’atlantique sud est franchi en acheminant 130 kg de courrier de Dakar à Natal au Brésil en 21 heures et 10 minutes contre 5 jours d’ordinaire en bateau. Un autre monde.
En 1933 « l’Aéropostale » devient Air France, Latécoère fournit désormais les compagnies aériennes.
Mais son regard se porte déjà plus loin. Il veut transporter plus vite et mieux. Ses passagers doivent avoir le même confort que sur un paquebot de croisière. Son choix se porte sur l’hydravion.
Latécoère cherche un camp de base. Ce sera le lac de Biscarosse.
Son eau douce préserve les coques des appareils, ses dunes de sables protègent des aléas de la météo et sa proximité avec l’Atlantique font du village landais le point de départ idéal pour conquérir le nouveau monde.
En 1930 il ouvre une base de montage et d’essai sur les bords du lac. Les pièces sont fabriquées à Montauban et acheminées par camion.
Le ministère de l’Air le suit dans son projet et acte la création d’une liaison commerciale avec les Etats-Unis.
Les travaux de l’hydrobase des Hourtiquets débutent en 1939.
En juillet, c’est l’apothéose. Le premier vol commercial non-stop New York-Biscarosse est réalisé. La ligne peut ouvrir. Ou Presque. La guerre qui éclate stoppe Latécoère dans son élan. La base est réquisitionnée par l’occupant qui y stocke son « Viking », le plus gros hydravion militaire jamais construit. Le Béarnais ne verra jamais son projet se concrétiser. Il meurt à Paris en 1943.
A la libération, Biscarosse n’a pourtant pas oublié son rêve de grandeur.
En 1947 ouvre la liaison Biscarosse- La Martinique.
Les riches parisiens souhaitant l’emprunter dévoient se rendre à Bordeaux en train puis à Biscarosse en bus.
Ils passent ensuite une nuit dans l’hôtel de la base avant de s’envoler vers Fort de France. Prix du billet : 10 000 euros.
Pour éviter ce long premier périple aux voyageurs, on prévoit même la construction d’un aéroport à côté du lac.
Il ne verra jamais le jour. Après seulement un an d’exploitation et des accidents à répétition, l’entreprise Latécoère périclite.
La base de Biscarosse doit fermer ses portes en 1955. L’année suivante, le toit du hangar alourdit par des chutes de neige (!) s’écroule sur les hydravions. Tout est fini.
Le groupe Latécoère est aujourd’hui détenu à prés de 90% par un fond d’investissement américain.
Les hydravions de nos jours sont principalement utilisés comme bombardiers d’eau. Le « Canadair » est le nom du modèle d’hydravion construit par la société canadienne Bombardier.
Depuis 1982 pourtant le site de Biscarosse renaît de ses cendres. Grâce à des passionnés et au maire de la ville, un musée voit le jour sur le site de l’ancienne base. Images et objets d’archives ainsi qu’hydravions grandeur nature comme cet Albatros (ci dessous) construit en 1951 pour l’US Air Force, entièrement restauré en 2018.
Une belle visite que je vous conseille pour revivre cette Histoire.
Les Visites d’Hubert